Dans deux décisions rendues le 17 juin 2024, le Tribunal des conflits clarifie la répartition des compétences juridictionnelles concernant les litiges relatifs à des dommages survenus lors de l’exécution de travaux publics, lorsque ceux-ci sont réalisés dans le cadre d’un contrat de droit privé. Le Tribunal affirme que le juge judiciaire est compétent dans ce type de litiges, même si les travaux exécutés présentent le caractère de travaux publics.
Contexte des affaires :
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Affaire Communauté urbaine Le Havre Seine Métropole : Il s’agissait d’un contrat de vente d’un terrain appartenant au domaine privé de la communauté, prévoyant à la charge de cette dernière des travaux de démolition et de réaménagement. Le litige est né à la suite de l'inexécution ou mauvaise exécution de ces travaux.
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Affaire Commune de Changé : Un lotissement a été aménagé par la commune sur son domaine privé, et des travaux de voirie ont été réalisés. À la suite d'inondations sur la parcelle d’un particulier, celui-ci a engagé une action en responsabilité, imputant les dommages à une mauvaise conception des voiries.
Dans les deux affaires, les dommages étaient liés à des travaux publics, mais leur fondement résidait dans un contrat de droit privé.
Décision du Tribunal des conflits :
Le Tribunal des conflits a jugé que dans de telles situations, l’action en responsabilité ne peut être dirigée que sur le fondement du contrat de droit privé conclu entre la personne publique et la personne privée. La nature publique des travaux n’a pas pour effet de transférer la compétence au juge administratif, dès lors que le litige trouve son origine dans les obligations contractuelles découlant d’un contrat de droit privé. Par conséquent, le juge judiciaire est compétent pour traiter de ces litiges, même si les travaux exécutés sont des travaux publics.
Portée de la décision :
Cette jurisprudence confirme que, même lorsque des travaux publics sont en jeu, ce sont les relations contractuelles entre les parties qui déterminent la compétence du juge judiciaire. Le juge administratif, quant à lui, conserve sa compétence pour les actions en responsabilité engagées directement à l’encontre de l’entreprise titulaire d’un marché public de travaux.
Ces décisions renforcent la distinction entre les compétences judiciaires et administratives en matière de travaux publics, en soulignant l’importance du cadre contractuel dans la détermination de la juridiction compétente.
Réflexion et impact :
Cette clarification invite les acteurs privés, comme les entreprises et particuliers contractant avec une personne publique, à bien comprendre que la nature du contrat prime sur celle des travaux dans les litiges en matière de responsabilité. Cela protège les parties des incertitudes liées à la compétence juridictionnelle et évite des chevauchements entre les juridictions judiciaires et administratives.